L’association entre le jeu et le plaisir peut sembler naturelle, voire intui- tive. Bien que l’hédonisme associé aux activités ludiques soit généralement évident chez les enfants qui se développent normalement, le jeu peut aussi être associé au déplaisir, à la souffrance et à une grande détresse psychique (Romano, 2010) pour les enfants qui ont vécu des traumas relationnels précoces (Bonneville-Baruchel, 2015). Le jeu ne semble donc pas obéir au principe de plaisir, ni d’ailleurs au prin- cipe de réalité, de la même manière qu’il ne se situe ni tout à fait dans le réel, ni tout à fait dans l’imaginaire (Winnicott, 1975). Cet article théorique et clinique s’inté- resse à l’évolution de la nature et du lieu du plaisir dans la psychothérapie d’enfants ayant vécu des traumas relationnels précoces (mais encore capables d’éprouver du plaisir). L’article tente de démontrer que le plaisir de ces enfants se situe initiale- ment dans la sensorialité, mais que la psychothérapie et l’accès au jeu et au faire semblant permettent néanmoins un passage du plaisir des sens au plaisir du sens. Les particularités du jeu des enfants traumatisés sont exposées et des vignettes cliniques sont également présentées pour illustrer différentes manifestations du plaisir chez les enfants victimes de traumas relationnels précoces.

Dans la documentation scientifique, aucun regroupement d’événe- ments de vie n’est associé de façon absolue à l’avènement du trouble de la per- sonnalité limite (TPL) à l’âge adulte. Une multitude de trajectoires peuvent de fait mener à l’émergence du trouble. Face à cette hétérogénéité des événements manifestes pouvant mener à un TPL, cet article vise à décrire des expériences rela- tionnelles qui, durant l’enfance, ont pu contribuer au développement de la patho- logie limite. Il est proposé que ces expériences forment, au-delà des différents événements spécifiques de la vie des individus concernés, le fondement latent du trouble. À cette fin, le TPL sera d’abord décrit du point de vue des symptômes et de la structure de personnalité, notamment en ce qui a trait à l’utilisation de méca- nismes défensifs primitifs, à savoir la diffusion identitaire, l’altération du rapport à la réalité et la pathologie des relations d’objet. Ensuite, trois types d’expériences relationnelles précoces seront présentés et mis en relation avec les manifestations symptomatiques et structurales. Ces expériences réfèrent aux échecs de la régula- tion des états d’excitation chez l’enfant, aux expériences relationnelles excessives d’inclusion et d’exclusion, ainsi qu’aux défaillances dans la capacité parentale à considérer les états mentaux de l’enfant.

Les avancées médicales des dernières décennies ont permis d’augmenter considérablement le taux de survie des bébés prématurés, mais il est toutefois encore difficile de prévoir les séquelles et les trajectoires développementales de ces enfants à long terme. Une bonne proportion de ces petits auront besoin d’un suivi prolongé spécialisé et adapté, ce qui fait de la prématurité un enjeu de santé publique. Le présent article constitue une revue réflexive des écrits entourant les impacts psychoaffectifs d’une naissance prématurée chez l’enfant, l’objectif étant de susciter une réflexion sur la naissance prématurée en tant que possible traumatisme psychique chez le nourrisson. Certaines séquelles neurodéveloppementales attribuées à la prématurité en soi, et souvent considérées comme organiques et irréversibles, pourraient plutôt être l’expression de traces du traumatisme de la naissance et de l’hospitalisation. Offrir à l’enfant prématuré et à sa famille des interventions visant à atténuer les effets nuisibles de ce traumatisme pourrait ainsi contribuer à favoriser son développement global.

Cet article décrit une méthodologie de travail spécifique et originale développée dans le cadre d’une thèse doctorale. Par le récit de cette méthodologie, en tant qu’elle reste imbriquée au sujet de thèse lui-même – les paradoxes identitaires chez de jeunes pères ayant un parcours de rue –, nous tenterons de sou- lever certains questionnements et d’engager une réflexion portant sur les enjeux cliniques et éthiques d’une recherche d’orientation théorique psychanalytique.

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This article describes a specific and original method elaborated in the context of a doctoral thesis. By exposing this qualitative methodology as it emerges from the thesis subject—fatherhood identity paradoxes in street youth—, the author proposes a reflection on clinical and ethical issues relevant to psychoanalytical research.

Les aidants humanitaires œuvrent dans des contextes instables qui mettent à l’épreuve leur subjectivité. Ils sont confrontés à des conditions extrêmes de travail et développent des relations avec leurs patients qui sont chargées quantitativement et empreintes de contenus peu symbolisés. En réaction à cette expérience au haut potentiel traumatique, ils érigent des systèmes défensifs variés (expulsion de la quantité, coupure de soi, etc.) et présentent une diversité de symptômes plus ou moins couteux pour l’appareil psychique. En lien avec leur réponse à la situation extrême s’élabore aussi une demande de prise en charge des besoins de leur Moi à laquelle l’objet-environnement répond de façon plus ou moins ajustée. Ainsi, cet article porte un regard psychanalytique sur la clinique de l’extrême et propose divers dispositifs métacontenants qui pourraient agir comme des facteurs de protection pour les aidants.

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Humanitarian caregivers work in unstable contexts that challenge their subjectivity. They are confronted with extreme working conditions and develop relationships with their patients which are quantitatively intense and imprinted with unsymbolized contents. In response to this experience of high traumatic potential, they erect various defensive systems (expulsion of quantity, “cutting” away from themselves, etc.) and present a variety of symptoms more or less expensive for the psyche. In connection to their response to the extreme situation, they also express a demand or a need for the support of their ego to which the object-environment responds in a more or less adjusted way. Thus, this article proposes a psychoanalytical look at the clinic of the extreme, and suggests metacontaining modalities that could act as protective factors for caregivers.

Anna Freud, la sixième et la plus jeune des enfants de Sigmund Freud, est devenue l’héritière et la gardienne officielle de l’œuvre de son père, quoique de manière ambiguë et dans la controverse. Fondatrice de la psychanalyse d’enfants avec ou contre Melanie Klein, elle a aussi cofondé des écoles mettant de l’avant une pédagogie psychanalytique et novatrice, non sans révéler ce faisant des interférences entre son analyse, son œuvre et sa vie. Son analyse avec son père, qui l’appelait « son Antigone », a fait l’objet d’articles de Freud (« Un enfant est battu » en 1919) et d’elle-même (« Fantasme d’“être battu” et rêverie » en 1922). Publiés très tôt, ces textes suscitent ambivalences et critiques voilées, ainsi que des interprétations sauvages selon lesquelles Anna Freud était tour à tour vieille fille et lesbienne. Cet article interroge les liens entre son analyse, poursuivie sous une élection paternelle dont elle bénéficie tout en étant prisonnière, et le regard que nous portons sur elle aujourd’hui. Si Anna Freud a certes été fidèle à la mémoire et à l’œuvre de son père et à ce qu’elle aura cherché à en protéger, elle a également eu une longue vie après la mort de celui-ci, vie où elle a aimé et frayé sa propre voie, notamment en fondant des lieux thérapeutiques psychanalytiques pour les enfants et en créant une œuvre originale en psychanalyse.