Par le truchement d’une présentation clinique, l’auteur tente de situer la place du corps en psychanalyse. Divers auteurs psychanalytiques sont invoqués — de la relation mère-enfant de la toute petite enfance jusqu’aux séquelles post-traumatiques lorsque le corps est ressenti comme objet fragmenté, objet partiel persécuteur, source de sensations diffuses inexplicables ou enjeu de conflits psychiques.

La prise en compte du langage corporel, du non verbal et des réactions contre-transférentielles dans l’intervention et plus particulièrement en psychothérapie est une démarche reconnue quoique d’importance inégale selon les approches ou points de vue. En ce qui concerne l’abord des jeunes de la rue ou en grande difficulté, la lecture et l’écoute du langage du corps deviennent essentielles voire incontournables. En effet, celui-ci participe à l’articulation des formes de détresse et d’affirmation de ces jeunes, lesquelles peuvent susciter des réactions très intenses chez l’intervenant qui a comme projet d’aller à leur rencontre. Le travail en équipe et l’écoute de son propre corps deviennent pour l’intervenant des impératifs tout aussi incontournables afin de préserver sa propre vitalité et son intégrité psychique. Interroger le corps, le sien et celui de l’autre est donc au coeur de la clinique de la précarité et de l’addiction.

Ce texte présente un fragment clinique qui illustre un travail de passage permettant la fabrication d’une substance psychique utilisable pour l’analyse. Se situant dans une zone intermédiaire entre la mise en acte corporelle, la construction d’images et la représentation de mots, l’auteure tente de rendre compte d’un effet du symptôme d’une patiente sur ses propres constructions psychiques dans le cours de son travail avec celle-ci. L’auteure rend compte d’un travail d’élaboration qui vise à utiliser ses propres points d’ancrage dans la parole afin de limiter un effet d’attraction hors du champ de la représentation de mots auquel thérapeute et patiente se situent à l’approche d’un noyau traumatique.

À partir de 1920, une impasse clinique et théorique confronte la psychanalyse. Elle amène Freud à redéfinir l’inconscient et à élaborer la deuxième topique, poursuivant ainsi la voie de la représentation. Reich, de son côté, en 1934, court-circuite l’appareil psychique et centre sa démarche sur l’énergie, ouvrant la voie du corps. L’impasse, dans un cas comme dans l’autre, ne sera pas pour autant levée dans l’immédiat. Deux vignettes, reliées par l’expression « lecture du corps », présentent un parcours sous l’éclairage de la psychanalyse contemporaine, du corps écrit, objet d’une lecture au corps lecteur sujet de la lecture.

L’auteur utilise la problématique du corps dans un contexte particulier, soit pour présenter sa notion de la transmission psychanalytique. Pour lui, en tant que professeur, la transmission de la psychanalyse et de sa psychopathologie doit évoquer chez l’étudiant les tensions entre rêverie et rigueur, toujours basées sur l’expérience clinique la plus ardue et constante. La transmission de la psychanalyse, idéalement, devrait écarter toute langue de bois. Malheureusement, l’existence de groupes et leur institutionnalisation exigent et imposent les jargons à travers lesquels les psychanalystes croient se reconnaître. Cette transmission évoquant les tensions entre rêverie et rigueur, l’auteur tente ici de l’illustrer en parlant de ce que comprend la psychanalyse du corps et de sa souffrance.

La pratique de la psychanalyse met l’analyste en contact avec son propre corps, touché par ce qui vient du corps de l’analysant. Celui-ci s’adresse à l’analyste en parlant de son corps, à partir de son corps. Réfléchissant sur quelques évocations cliniques, l’auteure se demande ce qui se passe entre l’analysant et l’analyste, quand le corps impose sa présence chez l’un comme chez l’autre, cela sans égard à l’organisation psychique qui prévaut chez l’analysant. Explorant alors le rapport entre le corps et la parole, elle s’interroge sur la façon d’aborder cliniquement ces différentes situations. Elle insiste, en conclusion, sur l’importance d’accéder à la parole comme issue à l’emprisonnement dans le corps, tout en précisant de quelle parole il s’agit.