Les réflexions qui suivent souhaitent questionner les processus en jeu dans notre rapport à la violence. De façon spontanée et presque nécessaire, nous considérons toujours que la violence éclate ailleurs, mais pas ici, du côté de notre humanité, comme si nous avions du mal à admettre que nous puissions également être habités de pulsions mortifères ou agressives. Devant les expressions collectives de la violence déshumanisante, qu’est-ce que notre discipline, occupée à l’analyse du singulier, a à dire ? Nous analyserons d’abord les modes de rejet ou de déni de la violence, qui sus- citent, comme ce fut le cas après les attentats contre Charlie Hebdo, la recréation d’une foule anonyme, suivant une forme d’uniformisation que la réalité virtuelle paraît accélérer. Ensuite, nous évoquerons l’absence de toute perlaboration après l’événement historique de la Shoah, événement qui se devait d’être oublié, sans quoi nous aurions été confrontés à la part d’inhumain qui nous habite. Enfin, pour conclure, nous nous demanderons si le rôle de la culture ne serait pas justement de faire une place à la reconnaissance et à l’assomption de l’autre en nous et à l’extérieur de nous.